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Utilisation de la mémoire par le processus de perception



Hypothèse _s   L'AP se concrétise par une structuration de la mémoire, dépendante de l'environnement perceptif.





Hypothèse _s   La structuration de la mémoire met en relation trois composantes: des canaux perceptifs, des canaux émotionnels [*] et des actions réflexes.



Il semble exister une interaction entre le souvenir (passé) et l'état actuel des sens. Ainsi, si un moyen de perception est altéré, il apparaît qu'un souvenir antérieur à la période d'altération est remémoré grâce aux moyens de perception actuels: si une personne perd l'usage d'un oeil, ses souvenirs visuels antérieurs à cette déficience émergeront comme si cet homme n'avait jamais eu qu'un seul oeil valide. Par conséquent, il semble qu'un souvenir, même s'il est lié au passé dans les faits, n'a pas une structure figée d'une manière définitive et qu'il est rappelé grâce aux aptitudes sensorielles disponibles dans le moment présent. Cependant, la mémoire n'a pas uniquement un lien direct avec les canaux de perception externe. Ainsi, un aspect du rôle de l'émotion dans la mémorisation a été mis en valeur par Le Doux. Celui-ci a montré que l'apprentissage de la peur peut non seulement se faire indépendamment du cortex, mais, en l'absence de cette partie la plus intellectuelle du cerveau, la mémoire de scènes d'une très forte émotionnalité est indélébile. Par conséquent, il semble que les moyens de perception externes et internes jouent un rôle de structuration de la mémoire. En d'autres termes, l'utilisation de la mémoire se fait à travers la perception.
D'autre part, il semble que la perception se fasse en utilisant la mémoire, mais aussi des actions réflexes. Ainsi, des études menées concernant la reconnaissance de scènes ou, plus particulièrement, de visages, ont montré l'importance du phénomène des saccades oculaires. O'Regan formule l'hypothèse que cette action interne a pour but d'aller chercher l'information dans la scène visuelle, là où l'individu pense qu'elle doit se trouver. Cela signifie qu'en dehors des zones explorées activement par l'oeil, des changements de la scène ne sont par perçus. Des expériences de psychologie expérimentale allant dans ce sens sont proposées dans [O'Regan et al., 1999] ou [O'Regan et Noë, 2001]. L'idée d'O'Regan est que l'information visuelle (que nous appellons plus généralement information perceptive) n'est pas une réalité en soi venant de l'extérieur: elle est le résultat d'un processus dynamique (impliquant l'utilisation d'actions réflexes) stimulé par la nécessité d'aller chercher l'information. Cela signifie que nous supposons que le processus de perception est essentiellement dynamique et que la reconnaissance d'une situation perceptive ne peut pas être effectuée instantanément, mais après l'exécution d'une certaine séquence d'actions internes à l'individu. Notre schéma dynamique du processus de catégorisation provient de cette idée.
Pourquoi, dans ce cas, utiliser la mémoire comme entrée de ce processus ? Nous pensons qu'il existe un mécanisme d'anticipation permettant d'aboutir à l'information perceptive. Le phénomène d'anticipation est actuellement au coeur de débats scientifiques sur l'existence ou non d'un modèle interne de l'environnement. Le lancé de balle est un bon exemple pour illustrer ce qu'est l'anticipation: lorsqu'un enfant joue pour la première fois avec une balle en la lançant verticalement, il effectue un mouvement vers la balle pour la rattraper lorsqu'elle redescend, provoquant un choc important; mais un réflexe se met en place, par apprentissage, pour ``amortir'' ce choc. Il a été montré que des signaux moteurs sont transmis à la main quelques millisecondes avant l'impact de la balle, de manière à faire descendre la main en anticipation du choc. Une hypothèse serait que l'individu utilise son expérience de manière inconsciente pour effectuer ce mouvement (voir les expériences menées entre autres au LPPA).
La mémoire traduirait l'évolution attendue de la perception (vue et toucher) à chaque instant, pilotant également le réflexe de suivi de la balle. Une expérience faite en apesanteur tend à confirmer cette supposition. On lâche une balle avec une certaine vitesse à la verticale d'un cosmonaute. Bien que celui-ci sache que la balle n'accélère pas, les signaux moteurs au niveau de sa main sont enregistrés au moment même où la main aurait dû descendre si les conditions de pesanteur avaient été présentes. Mais dans un cas d'apesanteur, ces signaux se déclenchent trop tôt.
Notre modélisation traduit cette faculté d'anticipation en posant une mémoire comme centre de ce mécanisme. Or, la mémoire étant structurée grâce à la perception et aux actions réflexes, l'anticipation se comporte comme un système prédictif sur l'évolution de la perception, couplé simultanément à l'envoi d'un signal moteur. Par cela, nous écartons le schéma classique impliquant une relation de causalité entre la perception et l'action (on perçoit, puis on agit en réponse de cette perception).
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2002-03-01