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2 Spécification d'une catégorie de problèmes générique à partir de l'hypothèse 10

L'hypothèse 10 est la clef de voûte de notre raisonnement. Ce paragraphe indique la manière d'interpréter et d'utiliser cette supposition.
Dans des méthodes d'apprentissages faisant appel au hasard (algorithmes génétiques, apprentissage par renforcement), ce dernier est utilisé pour explorer l'espace des états possibles du système, afin de découvrir (par hasard) une solution ou d'en améliorer une déjà existante 30. Dans les deux cas, il s'agit simplement ``d'attendre'' qu'un événement favorable se produise. Notre approche de l'utilisation du hasard est différente.
Nous allons considérer deux classes de problèmes:
  1. Imaginons que nous jetions une pièce de monnaie en l'air à l'instant t. Considérons l'ensemble des événements possibles générés par ce jet à l'instant t+1: ``la pièce tombe sur pile'' et la ``pièce tombe sur face''. A priori, si la pièce est correctement équilibrée, ces deux événements sont statistiquement aussi probables l'un que l'autre. Imaginons à présent une personne jetant cette pièce à l'instant t, après avoir effectué une prévision sur le résultat du jet, à l'instant t-1. D'un point de vue statistique, le taux de bonnes prédictions sur un nombre d'essais très grand correspond à la probabilité objective que la pièce tombe sur pile ou sur face. Ainsi, si la personne effectue non pas un jet mais disons 100 jets, après avoir donné une prédiction sur l'enchaînement précis des 100 jets, la probabilité de justesse de l'intégralité de la prédiction est égale à (1/2)100 $ \simeq$ 8.10-31. Cette très faible probabilité de deviner la bonne réponse est due à la très grande dimension de l'univers des possibilités qui sont offertes à la personne lors de son choix (dans notre exemple, il y en a exactement 2100 $ \simeq$ 1030). D'autre part, il paraît raisonnable d'affirmer que la personne servant de cobaye à l'expérience n'influence pas le résultat de celle-ci. Sachant cela, que penserions-nous si cette personne avait effectivement deviné l'enchaînement exact des jets, malgré cette si faible probabilité de bonne réponse ?
  2. Considérons à présent une personne devant répondre à un questionnaire comportant 100 questions. Admettons que celle-ci ait deux possibilités de réponses: ``vrai'' ou ``faux'' et que les questions soient toutes du type ``Le nombre entier 'n' est pair''. Pour déterminer les 100 entiers du questionnaire, on les choisit entièrement au hasard, en imposant simplement qu'un entier ne soit choisi qu'une fois au plus. Si on considère la personne comme un acteur passif de l'expérience31, la probabilité objective pour que les réponses au questionnaire soient toutes exactes est la même que celle de l'expérience précédente, puisqu'il existe une chance sur deux de répondre correctement à chaque question.
Les deux expériences sont objectivement similaires et possèdent deux univers des possibilités de même dimension. Pourtant, un élément essentiel diffère: dans le premier cas, on peut raisonnablement supposer que la personne cobaye ne maîtrise pas le résultat de son jet, donc que ses prévisions sont purement spéculatives, alors que dans le second cas, si la personne cobaye possède la notion de nombre pair ou impair, elle saura répondre avec certitude à l'intégralité du questionnaire. Mais comment discerner en pratique ces deux cas de figures ? Pour cela, admettons qu'une deuxième personne (l'observateur) puisse choisir a priori l'étendue de l'univers des possibilités offertes à la personne cobaye, commun aux deux expériences, sans pour autant en connaître la nature: elle est avertie uniquement des résultats de la personne cobaye pour chacune des deux tâches, sans savoir en quoi celles-ci consistent, mais en maîtrisant toutefois la probabilité de bonne réponse. Dans notre exemple, cela signifie que l'observateur donne a priori le nombre de jets, ainsi que le nombre de questions (qui sont identiques dans ce cas précis). Une technique simple permettant de discerner les deux expériences est de regarder l'évolution des bonnes réponses en fonction d'une augmentation progressive de la taille de l'univers des possibilités. On imagine facilement que, pour la première expérience, une demande de prévision sur l'enchaînement d'un nombre de jets trop important n'aboutira à aucune bonne réponse. En ce qui concerne la deuxième expérience, le même résultat sera obtenu si la personne cobaye ne connaît pas la notion de nombre pair, alors qu'un résultat invariablement positif sera obtenu dans le cas contraire, quel que soit le nombre des questions.

Mais, quel rapport y-a-t-il entre ces deux exemples et notre problème ? L'exemple 1 est un cas typique pour lequel l'expérience de l'individu, prise dans le sens général, n'est d'aucune utilité pour lui permettre de fournir la bonne réponse. Ainsi, l'atteinte de l'objectif (trouver la bonne réponse) n'est pas guidé par une connaissance apprise (mémorisée). Au contraire, l'exemple 2 montre que l'utilisation d'un savoir (mémorisé) permet d'obtenir la bonne réponse à coup sûr. Ces deux cas sont triviaux, mais ils marquent deux catégories extrêmes de problèmes: ceux pour lesquels la personne cobaye n'a aucun contrôle sur le résultat qu'elle souhaite obtenir, et ceux pour lesquels elle peut acquérir une connaissance permettant de donner à coup sûr le bon résultat. Dans notre deuxième exemple, la connaissance apprise permet de réduire l'univers des possibilités à une unique solution, qui est la réponse exacte au problème. Par conséquent, même s'il existe environ 1030 solutions potentielles, l'utilisation de la mémoire permet d'extraire un unique candidat, avec certitude. Nous pensons qu'il est essentiel de savoir distinguer ces deux cas de figure, qui sont mixés dans des problèmes réels: une réponse à un problème de la première catégorie est incertaine, par essence, et ne répond pas aux exigences de sécurité demandées par un être vivant (hypothèse 7), alors qu'un problème de la seconde catégorie peut être traité de manière certaine. D'une manière purement objective, le résultat dépend du fait que des connaissances appropriées sont utilisées ou non. Mais, si on se place uniquement du côté de l'observateur, qui ne connaît pas la nature des problèmes posés à la personne cobaye, on ne verra pas de différence entre les résultats d'une personne confrontée à un problème qui peut être résolu avec certitude mais qui ne possède pas les connaissances appropriées, et les résultats d'une personne faisant face à un problème purement aléatoire (catégorie 1).
Pour pouvoir effectivement distinguer les deux types de problèmes, on a donné à l'observateur la règle de décision suivante: fixer une taille assez importante à l'univers des possibilités, puis observer la réponse de la personne cobaye. Si celle-ci est correcte, on décide que le problème est de type 2, sinon il est de type 1. Même s'il est toujours théoriquement possible que la personne cobaye ait donné la bonne réponse au hasard, cela devient pratiquement impossible si sa probabilité d'apparition est trop faible. On peut naturellement opposer une réflexion à cette règle de décision: si une mauvaise réponse est apportée, il existe deux raisons: le problème est objectivement de type 1 ou le problème est objectivement de type 2 mais la personne cobaye ne possède pas les connaissances nécessaires à sa résolution. À cela, nous formulons une contre-objection: pouvoir affirmer que la personne cobaye s'est trompée alors que le problème est objectivement de type 2, c'est connaître la nature de ce problème, donc utiliser des connaissances sur celui-ci, et finalement ne plus être observateur, du moins tel que nous l'avons défini (l'observateur ne connaît rien de la nature du problème traité). L'information qui nous intéresse ici n'est pas la nature du problème pris indépendamment de la personne cobaye, mais le résultat de l'interaction entre les deux: c'est justement ce que l'observateur obtient, sans plus de précision.
Dans la suite de ce recueil, tous les problèmes seront vus dans les conditions et avec l'oeil de notre observateur. La réponse de ce dernier correspondra à celle du signal interne de certitude, dont nous avons supposé l'existence. La base de l'étude de chacun des problèmes devra répondre aux exigences suivantes:


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Frédéric Davesne 2001-07-13